Donc je suis Pinky Pow, j'ai 21 ans, je suis étudiante en japonais (c'est cool mais difficile!!), je vis en région parisienne et je suis écrivain à côté. Pourquoi je le précise? Déjà parce que cette présentation sera longue par pure déformation professionnelle (déso pas déso) mais surtout parce que je fais partie de ces écrivains qui n'écrivent jamais sur eux-mêmes. Donc autant vous dire que j'ai le cœur qui bat à deux cents à l'heure rien qu'à l'idée de parler de moi et de mon asexualité que je vis pas très bien! Mais voilà, si je n'en parle pas maintenant, quand le ferais-je? (c'est bien simple : jamais, c'est justement ce qui m'a attirée ici).
J'ai réalisé mon asexualité seulement dernièrement, après une (très) longue phase de déni où je vivais ma virginité comme une tare (et encore aujourd'hui, je me rends compte que j'ai à ce point encaissé la pression de la société qui est que, tant qu'on a pas couché, "on peut pas savoir", que je ne peux m'empêcher de me demander si je ne devrais pas me forcer d'abord...)(sauf que clairement : non, au secours, j'ai pas envie, j'ai jamais eu envie, pourquoi je devrais me forcer!!), accentué par le fait que je suis hétéro-romantique, donc ayant déjà eu des "crush" et compagnie, je me disais que j'étais "prude", une gay refoulée comme pensait ma psy (ahem... on vous l'a faite à vous aussi, hein? Ça m'a fait douter ça en plus!!) ou juste "bizarre", "anormale". Ça a coïncidé au moment où j'ai commencé à m'intéresser aux questions de féminisme, de transidentité, d'homosexualité, de racisme, etc. Bref toutes ces "différences" qui font qu'on se fait rejeter/discriminer si facilement. J'ai lu plein d'articles jusqu'à tomber sur ceux concernant l'asexualité, mais sans m'y identifier au début. Pourtant tout ce qui rapportait à mon corps et à ma sexualité m'avait toujours dérangée (je supporte pas qu'on complimente mon physique, qu'on me touche, etc), et même si dans les livres je m'identifiais complètement au contenu romantique, je n'ai jamais ressenti de désir de ma vie envers personne, même lorsque j'avais des sentiments très forts pour quelqu'un. Par ailleurs, j'ai toujours fait une différence entre amitié et amour, pourtant sans ressentir de désir, or c'est un peu ce que tout le monde donne comme "limite" entre les deux, comme si le sexe expliquait toujours tout, ne m'aidant absolument pas à y voir plus clair (Serais-je amoureuse de mes amis sans le savoir? Comment j'arrive à faire une différence entre lui que j'aime d'amour et lui que j'aime d'amitié si y'a pas de sexe? Bref, que des questionnements que la société m'a appris à me poser...).
Ma compréhension s'est faite petit à petit. Je suis sortie de mon déni à force de lecture et surtout en me rendant compte que mon ex (que j'aimais pourtant littéralement à la folie...) ne créait chez moi aucun désir, mais sans que cela ne remette en question ce que je ressentais pour lui. A partir de là, enfin, j'avais compris : j'étais asexuelle. Il a rompu avant que je puisse aborder ce sujet vraiment avec lui (je suis presque sûre qu'il était asex ou demi-asex) ce qui aujourd'hui ne m'aide pas à envisager l'avenir sainement et me fait me dire, comme certains asex apparemment, que "je vais rester seule toute ma vie" (bon la rupture très brutale aide pas hein, on va pas se mentir). Après, être seule ne m'as jamais posée de problème, donc je sais qu'une fois cette relation digérée, je retournerai à mon célibat longue durée et arriverai à vivre à avec. C'est plutôt l'idée de tomber à nouveau amoureuse de quelqu'un qui me fera souffrir (peut-être à cause de mon asexualité qui poussera la personne à me rejeter?) qui me dérange. Je me dis qu'il arrivera forcément un moment où mon asexualité posera problème et ça, je ne sais pas comment y faire face.
Voilà, c'est la première fois que je m'inscris sur un forum comme celui-là. Et d'ailleurs ce que j'ai expliqué là, je ne l'aurais évidemment fait nulle part ailleurs, et certainement pas sur un forum dédié à la sexualité puisque pour la majorité des gens, asexualité=pas de sexualité du tout=pas d'avis. Or, je me rends compte maintenant que j'ai besoin de parler de ça quelque part. De parler à des gens qui me comprennent, qui n'ont pas à faire l'effort de comprendre ce que c'est d'être "comme moi", qui ne me jugeront pas pour ma virginité à coup de "mais tu peux pas savoir" (et quand bien même ce serait le cas, au pire, je fais ce que je veux!! La sexualité n'est pas figée dans le temps et ça enlève pas mon besoin d'affirmer ce que je suis à un instant t!!). Puis je crois que quelque part, j'ai besoin d'être dans un espace où la sexualisation de tout ne serait pas omniprésente, car je pense que comme beaucoup d'asex, c'est quelque chose que je vis mal au quotidien. Je vis mal mon asexualité et mon impression constante d'être anormale, et même si je sais qu'objectivement je suis aussi normale que n'importe qui au fond de moi je suis pas si raisonnable. Je pense que côtoyer des gens qui ont les mêmes questionnements que moi pourra vraiment m'aider sur le chemin de l'acceptation de soi.
Désolée pour le pavé! Et sinon pour en revenir au "moi écrivain", il faut savoir que j'écris également beaucoup de fictions sur internet et que, suite au jour où je me suis rendue compte que la représentation des asexuels dans la littérature était quand même pas mal catastrophique (être asexuel et/ou aromantique c'est forcément être asocial, misanthrope, bizarre, froid, gros intellectuel sans sentiments ou alors -pire- juste frigide...), j'ai inventé un personnage asexuel et aromantique : c'est un garçon enjoué, sans problèmes, qui a beaucoup d'amis, rend souvent service, et se caractérise pour un amour des bande-dessinés et des films. Bref, quelqu'un de normal quoi, comme on l'est tous. Et mine de rien, écrire ce personnage m'avait bien aidée à l'époque!
En espérant participer à des discussions intéressantes sur ce forum, je vous dis à bientôt.
. Je l'avais écrit ailleurs, mais en plus du romantisme on a, à la base, 4 types d'amour : la philia (+/- l'amitié), l'éros (pas Ramazotti mais pas loin, le sexe quoi), l'agapê (l'amour pur, inconditionnel, celui que l'on rapproche facilement de l'amour chrétien incarné par la charité) et le storgê (la famille). C'est dire à quel point la vision de l'amour que l'on nous vend aujourd'hui est d'une pauvreté... et que justement la société ne veut pas que tu remettes vraiment en question 
"oui je sais que t'as dit être allergique au pollen mais offrir des fleurs c'est romantique alors tiens, voilà quinze bouquets"), c'est limite s'il ne m'a pas crachée qu'à cause des connasses comme moi, tous les mecs sympas "comme lui" passent pour des salauds (ou autrement dit, "salut tu me fais part d'une truc qui te met mal au quotidien mais je préfère tout rapporter à moi parce que moi moi moi pauvre de moi qui espérais te re-pécho en te complimentant"). Bref, autant dire que depuis ce jour-là j'ai plus jamais répondu à ses messages.
