Entre 0 et 1/2 ou sur un autre axe ?

[Ener]

Bonsoir

J'aurais besoin de votre aide pour arriver à me catégoriser (j'aimerais savoir si je suis plutôt demi avec une libido "spécialement faible" ou asexuelle mais avec quand même un peu de désir, ou peut-être que je maîtrise encore mal ces notions, désolée si je dis des erreurs :/), car même si je commence à avoir une petite idée je sais que je manque largement de connaissances sur le sujet.

Je ne me suis jamais dit en voyant quelqu'un "tiens c'est personne est canon il faut qu'on soit ensemble ce soir" et de manière générale la perspective d'avoir des relations sexuelles avec une personne réelle c'est 100% hors de question, je pourrais pas (alors que pour des fantasmes ça ne me gêne pas tant que l'autre n'est qu'une personne fictive. D'ailleurs je ne réagis pas aux films pornos mais les livres si, je sais pas si ça peut rentrer en ligne de compte)
En revanche, j'ai ressenti du désir pour mon ex quand elle a commencé à me montrer le sien, et pour mon copain à partir du moment où une sorte de routine de couple s'est mise en place (d'ailleurs après 8 mois dans la même ville on est en relation à distance pour les études)
=> du coup ce "non hors de question sauf si relation de confiance/intimité très forte" ça me semblait plus correspondre à la demie sexualité

Cependant ce qui me met le doute c'est que je suis pas certaine que toutes les fois où je pense ressentir du désir je le ressens vraiment. J'ai une peur très tenace que mon copain ne me désire plus (je sais même pas d'où elle sort ^^'), du coup je vais avoir tendance à accepter même si je suis pas en train de me consumer de désir (mais ça ne me pose pas spécialement problème. Ce qui m'en pose plus, c'est que selon la même logique je vais avoir du mal à demander quelque chose qui me fait envie parce que "t'es vraiment sûre que t'en as réellement envie ?" mais on s'écarte du sujet^^)
Du coup je sais que ça m'est arrivée de ressentir réellement du désir mais je ne saurais pas faire la part des choses pour dire si c'était ultra ponctuel ou un peu moins, d'autant plus que ça fait un an et demie qu'on est à distance et mes souvenirs commencent à être un peu flou.

L'autre facteur qui me fait hésiter c'est que globalement je ressens de moins en moins de désir/libido (je crois que je suis pas non plus au point sur lequel parle de vouloir avoir une relation avec quelqu'un et lequel parle de juste avoir besoin des hormones peu importe comment) avec le temps qui passe. Avant je devais en ressentir toutes les 3/4 semaines et ça ne me dérangeait pas de me débrouiller toute seule, mais depuis plusieurs mois je suis plus sur une dynamique de me forcer parce que j'ai lu que c'était bon pour la santé (ou éventuellement comme compensation à une frustration au même titre que du chocolat quand je suis complètement claquée et que mon cerveau commence faire n'importe quoi et à s'emmêler les pinceaux entre les hormones). Et même la perspective de revoir mon copain bientôt ne me fait rien ressentir de ce côté là, alors que j'imagine qu'un couple plus sexuel organiserait déjà une soirée coquine ?

Contrairement à d'autres, je n'ai pas de réel vécu traumatique par rapport à ça (c'est en partie pour ça que je me sens pas légitime de me réclamer appartenir à une communauté minoritaire), à part éventuellement la fois où mon père m'a mis de force des préservatifs dans ma valise avant le we d'intégration (quand j'ai vaguement essayé de lui expliquer que c'était hors de question que j'aie une relation sexuelle pendant ce we il a réagi en mode rien à faire au moins t'as les préservatifs), la fois où des amis parlaient de leurs crush extra conjugaux et avaient l'air de me dire que mais si mais si moi aussi je finirai par désirer qqn en dehors de mon couple, ou les rares fois où je me suis forcée à un acte alors que pour une fois je savais que je voulais pas, par peur de déplaire.

Je n'appréhende pas trop le "retour en présentiel" du couple, car je sais qu'à partir du moment où j'arriverai à poser mes limites, mon copain est très respectueux de ça, et il comble la différence de désir par un pragmatique "au pire j'ai une main"^^

Désolée si c'était un peu confus tout ça, et merci pour votre aide

[emerach2]

Bonjour,

Je pense sincèrement que tu connais déjà la réponse, ton récit est très lucide et tu sembles plus avoir besoin de confirmation.
Après quel terme est le plus approprié ? c'est compliqué, Kinsey a tenté une approche de l'orientation genré en 6 tranches principales.
Il y a plein de nuance et de spécificité pour les mots mais le principal c'est que tu te sentes à l'aise avec le terme que tu choisira de partager avec les autres. En soit ta sexualité est unique, les circonstances ou le cadre peux t'amener à préférer un mot par rapport à un autre. Dans ton cas tout ce que tu as dit est valide.

[Orchis]

Tu te dis demie si cela t'arrange (ou asexuelle si tu préfères) et tu te laisses du temps pour voir comment cela se décante. Ce genre de processus peut prendre du temps. Perso, j'ai mis 20 ans. Tu es déjà 'achement plus avancée que moi à ton âge.

Les étiquettes sont là pour aider, pas pour se mettre la pression.
Tu peux même les alterner en fonction de la vitesse du vent et de l'âge du capitaine si cela te chante.
Ou te dire à cheval entre les deux.
Ou mettre les deux.
Comme tu veux.

En plus, comme on est sur un spectre (et sur du ressenti par dessus le marché), j'aurais tendance à dire qu'il n'y a pas de limite précise.
Sans compter que l'on peut se déplacer sur le spectre au cours de sa vie, de ses expériences, de ses rencontres...
Tu peux être demie à un instant t et asexuelle à un instant t+1. Ou rester au milieu. ^^

depuis plusieurs mois je suis plus sur une dynamique de me forcer parce que j'ai lu que c'était bon pour la santé (ou éventuellement comme compensation à une frustration au même titre que du chocolat quand je suis complètement claquée et que mon cerveau commence faire n'importe quoi et à s'emmêler les pinceaux entre les hormones).

Comme compensation, pourquoi pas. Mais se forcer pour suivre les conseils d'un magazine / étude plus ou moins bien ficelée, non. Mauvaise idée, ça risque surtout de te mettre dans un rapport "corvée" par rapport au sexe.

Contrairement à d'autres, je n'ai pas de réel vécu traumatique par rapport à ça (c'est en partie pour ça que je me sens pas légitime de me réclamer appartenir à une communauté minoritaire)

Pas besoin de vécu traumatique... Il ne faut pas toujours écouter les gardiens (auto-proclamés) du temple.
Si cela t'aide, n'hésite pas à te réclamer de la communauté.

[fiffi]

Bonsoir Ener ,

tu as besoin de confirmation et de reprendre confiance en toi . Choisis le terme qui te semble te correspondre le plus , celui avec lequel tu es le plus à l' aise . Tu peux en changer si tu t' aperçois qu' un autre te décris mieux .

Le désir et la libido fluctuent selon différents facteurs . La libido est donc plus ou moins présente , elle peut même disparaître puis réapparaître , c' est mon cas et le cas de beaucoup d' autres A ou non . je ne suis pas sur qu'un couple sexuel pense à organiser une soirée coquine à chaque retrouvaille , la fatigue , l' âge , la durée du couple , entres autres , sont des éléments qui touchent plus de monde qu' on ne l' imagine .

Certains ont vécus ou vivent des traumatismes mais d' autres n' en n' ont pas . Tous , y compris toi , sont légitimes pour se sentir appartenir à une minorité . Savoir qu' un A vit bien son asexualité nous fait plaisir et un témoignage positif est susceptible de redonner confiance à un A qui s' accepte moins bien .

[Ener]

@emerach2 : j'ai été regarder l'échelle de Kinsey, mais il me semble, en tout cas avec ce que j'ai trouvé, que ça se centre plus sur l'orientation hétéro/homo ? Ou alors j'ai peut-être mal cherché^^ en tout cas merci beaucoup

@Orchis : merci pour ta réponse j'avoue qu'avoir une étiquette est quelque chose qui me rassure, quel que soit le sujet ^^' mais je vais me laisser le temps de m'observer, pour voir comment ça évolue et m'habituer à l'idée d'une étiquette fluctuante :p
d'accord du coup, pas de mode corvée^^

@fiffi : merci pour tes explications

je vais répandre les témoignages positifs du coup <3

[bengir]

je trouve que tu t'exprimes très bien et déjà c'est important tu as le courage de te poser les questions et tu sembles à l'aise avec ta différence.
il m'aura fallu plusieurs décennies pour en arriver là
aussi je pense que tu trouveras tes réponses
j'étais allé consulter une sorte de thérapeute comportementaliste /sexologue a l'époque ou je me croyais malade et elle m'avait dit
tu est le meilleur spécialiste mondial de ton intimité
ça m'avait fait rire mais maintenant je sais que cette phrase était la seule vraie et ça m'a beaucoup aidé

[choooj]

Je n'ai pas non plus de vécu traumatique. Je fluctue entre l'asexualité et la gray-sexualité. Je n'en suis pas à éprouver cette bouffée de désir, pulsion inapaisable d'avoir une relation torride avec n'importe quel humain pour peu qu'il satisfasse un nombre limité de critères. Les S vivent ce genre de moments. Quand je désire mon partenaire, cela ne se réduit pas qu'à l'aspect charnel (au fond cette composante reste faiblarde au regard du reste). Le rapport sexuel est un terrain d'échange intellectuel, un moment où on se met hors zone de confort (ce qui offre l'avantage de s'explorer soi-même et l'autre sous un angle différent). C'est à la fois un câlin où les organes sexuels se touchent, et une lutte physique pour le plaisir où les organes sexuels se touchent. L'échange intellectuel, la "mise en danger", le câlin, la compétition ludique sont des situations plaisantes pour moi et qui peuvent se vivre sans recourir au sexe. Je connais d'ailleurs plein de situations non sexuelles où ces 4 critères s'appliquent aussi et que j'aimerais partager avec mon compagnon.
Je dis souvent dans ce forum, que j'aborde le sexe comme une langue étrangère. Pour moi-même je n'ai pas besoin de la pratiquer. Parler dans cette langue n'a de sens que lorsque mon partenaire est S et qu'il exprime son désir, ses fantasmes. Je m'empare de ce langage à mon tour, pour l'emmener dans un voyage sur mes territoires, pour qu'il goûte aussi à ce qui m'intéresse. Je traverse son terrain avant de l'entraîner sur le mien.

Faire du sexe en bon conformiste non ! Je rejoins tout à fait ce qu'a dit Orchis. Faire du sexe dans le sens où j'ai plaisir d'offrir du plaisir à mon partenaire, vraiment le moins souvent possible car si ça passe les premières années, la lassitude s'installe et sur le long terme ça me coûte. Bien sûr, je suis heureuse de rendre l'autre heureux, mais je préfère quand moi aussi je prends ma part. C'est en prolongeant cette réflexion que j'ai identifié des situations compatibles avec l'acte sexuel et qui ME plaisent.

Je ne sais pas si tout cela te parle Ener, ce ne sont que quelques pistes. Je t'invite en tout cas à beaucoup d'introspection.

[clotaire]

Et même la perspective de revoir mon copain bientôt ne me fait rien ressentir de ce côté là, alors que j'imagine qu'un couple plus sexuel organiserait déjà une soirée coquine ?

Dans les films peut-être, mais franchement, dans la réalité, ça me semble être une représentation assez caricaturale. La normalité est sans doute plus banale qu'on ne l'imagine…

[Ener]

@bengir : merci beaucoup je pense aussi que j'ai eu de la chance en pouvant entendre parler de ces thèmes assez tôt dans ma vie car globalement il existait déjà une réflexion dessus, et que ce n'est pas le cas de tout le monde... Cette phrase est très vraie, merci de l'avoir partagée !

@choooj : c'est une comparaison très intéressante ! Je pense que je vais avoir besoin de méditer tout cela car j'ai encore du mal à savoir ce que je veux, comment je veux parler cette langue et cela me frustre parfois un peu aussi. Merci pour toutes ces pistes

@clotaire : c'est possible... J'avoue j'en parle pas avec d'autres couples, donc j'ai que les films comme référent