Nécroses

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Divine
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Nécroses

Message par Divine »

La petite sirène

La voiture vrombit alors que le paysage défile. «Vrombir», c’est un nouveau verbe que m’a appris maman. Je ne sais pas si je l’utilise correctement mais je le trouve joli. Les R roulent bien, comme les roues de la voiture. De l’autre côté de la vitre, le ciel gris. Puis, il y a des arbres sans feuille. C’est la fin de l’automne. J’aime pas l’automne, ça me rend triste. Parce que très vite, on va plus à la plage. On y va pas souvent mais, quand on y va, je «saute comme un poisson dans l’eau ». Maman dit que je me trompe d’expression mais moi je m’en fiche, je la préfère comme ça.

La dernière fois qu’on est allé à la mer, c’était il y a deux mois, en août. Maman n’aime pas l’eau et elle n’aime pas que je m’en approche. Elle doit toujours me surveiller quand on va à Anthill Beach et ça la fatigue. Mais, papa disait qu’elle n’avait pas à le faire tout le temps, qu’il y a des sauveteurs pour ça. Je voyais bien que son air ne changeait pas, à maman, qu’elle avait toujours ce petit pli au coin de la bouche, mais elle s’était laissé convaincre. Alors, papa avait chargé la camionnette avec les chaises, les serviettes, les pelles, les sauts, le parasol, les sodas et les saucisses. Mais, il avait oublié les pains à hot-dogs. Tant pis. De toute façon, je n’avais qu’une envie : aller nager.

J’ai sauté dans l’eau! Puis, J'ai couru le plus vite que je pouvais, ralentissant toujours un peu plus alors que je m’avançais vers l’avant, là où le ciel rejoint la mer. On appelle ça l’horizon. Je me suis sentie très frustrée de ne pas pouvoir courir plus vite. Ça serait tellement plus facile si j’avais des nageoires. J’adorerai avoir une vraie queue de poisson, comme les sirènes dans les histoires que me raconte parfois papa. En plus, j’ai déjà des branchies au cou. Papa dit qu'elles sont dys-fonction-nelles...Sais pas ce que ça veut dire. Puis, je suis née comme ça. Je trouve ça normal parce que j’ai passé 9 mois dans de l’eau avant d’exister. J’ai même entendu à la télé que tous les bébés en ont quand ils sont dans le ventre de leur mère. Maman dit que c’est que des histoires…

À un moment, mes pieds ne touchaient plus le sol. J’ai donc commencé à nager pour de vrai, toujours vers l’horizon. Je n’avais pas peur parce que j’ai mes branchies. À un moment, je me suis tournée vers la plage. Il y avait maman, papa. Quand maman m’a vu, elle s’est mise à courir vers moi. Elle avait peur et elle voulait que je revienne, maintenant. Moi, je voulais nager encore. Alors, j’ai nagé plus loin, pour pas qu’elle puisse me rattraper. Je me suis dit que si je restais encore un mois ou deux de plus dans l’eau, j’allais finalement finir ma formation, celle que j’ avais pas terminé dans le ventre de ma mère, et devenir une vraie petite sirène, avec les nageoires et la queue qu’il faut. J’ai plongé la tête sous l’eau.

Quand je me suis réveillée, j’étais couchée sur le sable. Je voyais rien parce que le soleil me piquait les yeux. Mais, il y avait des têtes au dessus de la mienne et j’entendais maman pleurer. On m’a dit que j’avais failli me noyer, j’ai dit que c’était impossible. On est jamais retourné à la plage après.

On est dans la voiture. Mes parents m’ont dit qu’on pouvait pas rester à la maison. Chez nous, il y a pas des hôpitaux qui s’occupent des cas comme moi, maman dit. Mais, le voyage est trop long. Je demande à mes parents s’il aurait pas été mieux d’aller chez le vétérinaire de chez nous, plutôt. Ça ne les a pas fait sourire. Je dépose la tête sur la portière et je ferme les yeux.

Je ne me rappelle pas m’être endormi. Pourtant, ça a bien dû arriver puisque je me réveille. Je lève les yeux pour regarder dehors. Il y a des immeubles très hauts qui touchent le ciel. Je me demande si, parce que ça touche le ciel, ça s’appelle aussi l’horizon. «On est arrivé», papa dit. Je n’aime pas les hôpitaux. Ça pue les vieux et le plastique. En plus, les couleurs y sont toujours ternes. Je crois qu’un joli violet arriverait mieux à me guérir que du blanc.

On sort de la camionnette. J’ai une boule au ventre. Mon père prend ma main et on rentre dans le grand hôpital. Mes parents disent que c’est pour des gens avec des problèmes spéciaux. Une madame en blouse blanche vient parler à ma mère. Mon père et moi, on s’éloigne quelques minutes. Il m’achète un biscuit dans un distributeur et on attend en silence. Puis, maman finit par revenir mais je dois suivre la dame en blouse. Elle est toute pâle, elle ressemble à un fantôme. Mes parents viennent avec nous. Pas un mot. Pas un sourire. Je leur demande ce qui va se passer. Ils finissent par me dire que je serais enfin normal. Comment ça normal? «On va se débarrasser de tes branchies», m’explique maman, toute sèche. «Si c’est ça, j’ai pas envie d’être normal!», je braille. Et puis, sans elles, je ne pourrais plus respirer à Anthill Beach. Ma mère se fâche. Papa dit que je peux pas aller sous l’eau comme ça, avec les poissons, il dit. Comprends pas. Le fantôme en blanc m’agrippe le bras et me traîne avec elle, ignorant mes larmes. «La laisse pas faire!», que je cris à papa. Mais, mes parents sont déjà loin derrière moi. J’ai les yeux plein d’eau. Puis, je sens une piqûre. On me pose sur un lit. J’arrive plus à bouger. J’aimerais crier mais j’y arrive pas. Ça reste bloqué dedans. Je les vois se pencher au dessus de moi. Ça y est, je sais ce qu’ils vont faire. Ils vont me cimenter la gorge, boucher mes branchies. C’est la fin. Je voudrais qu’il me rentre le petit coupeau (les fantômes l’appellent «scalpel») dans la gorge, pour agrandir les trous. Je ne veux pas être normal, je veux être une sirène. Je vois faire les fantômes en blanc, je les entends parler. Mais, je ne ressens rien, sauf la peur. Ils vont me coudre mes branchies.

«C’est bientôt fini…», dit l’une des blouses blanches.

Soudainement, j’étouffe. Je n’arrive plus à respirer. Les fantômes se demandent ce qu’ils passent. Pourquoi la petite ne respire plus? Je ferme doucement les yeux. Ça y est, c’est bientôt fini.

Ils n’avaient pas senti le souffle qui me sortait des branchies, avant de les boucher et de les coudre avec un fil rouge.
Dernière modification par Divine le 25 mars 2014, 01:34, modifié 1 fois.
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gotzs
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Re: La petite sirene

Message par gotzs »

triste et beau :oops:
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Divine
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

Merci beaucoup de m'avoir lu et d'avoir pris la peine de commenter. Je ne suis pas une vraie écrivaine mais j'étais plutôt fier de cette nouvelle-ci.
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Re: La petite sirene

Message par RValiasRV »

Belle petit histoire ! J'ai beaucoup apprécié aussi :)

C'est superbement trouvé, une petite histoire où il ne manque rien, l'intrigue colle formidablement au format....J'aime cette petite pointe de «surréalisme» (est-ce bien cela ?), et surtout ce petit quelque chose dans ton style :P
L'homme a toujours voulu croire en quelque chose car il est difficile de croire en soi.
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

Oui, c'est un texte essentiellement réaliste...Mais avec une petite touche qui ne l'est pas.
Merci beaucoup.
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

ICH BIN EIN BERLINER

Leur avenir s'était écroulé avec le Mur. Pendant la nuit du 9 novembre 1989, cette muraille cimentée et les miradors qui séparaient les capitalistes des socialistes avait éclaté en morceaux sous la pression des manifestants. Ce rempart de béton, presque aussi célèbre que la muraille de Chine, n'était déjà plus qu'un souvenir. Le mur de Berlin détruit, il n'y aurait plus de frontière autre part que dans la mémoire collective, les statistiques. Dès le lendemain, partout dans le monde, l'on rediffusait ce vieux discours de Kennedy, proféré en 1963, clamant : « Ich bin ein Berliner*. » et que Dieu bénisse cette chienne d'Amérique. L'histoire nous parle jamais que des vainqueurs...Ainsi, nous oublions les perdants.
Quelque part, du côté soviétique du mur, il y avait un couple : Jarek et Olga. Chez eux, ces gens de l'Est regardaient la télévision. Ils y voyaient le mur s'effondrer avec leurs rêves et ils entendaient un Américain pur et dur proclamer que, lui aussi, il était Allemand. À travers la boîte à images, le couple observait ces familles berlinoises qui se serraient les unes contre les autres, heureux de s'être enfin retrouvé après toutes ces années séparées par du béton, dans une effusion de larmes d'un kitsch écoeurant. Qu'arriverait-il désormais? Les uns se retrouvaient, en direct sur nos écrans, et beaucoup quitteraient le pays. Cependant, qu'adviendrait-il de ceux qui choisiraient de rester dans cette fourmilière qui les a vu naître? Voilà les questions que Jarek se posait tout en serrant tendrement la main de son épouse. Cette prétendue victoire laisserait à jamais un goût amer dans leurs bouches.
Novembre fila et bientôt ce fut décembre, janvier, février...Jarek, qui avait toujours enseigné la littérature aux universitaires de l'Est, ne travaillait plus, pas plus qu'Olga qui, par ailleurs, était également professeur dans ce même établissement. Les diplômes et l'expérience acquise du côté de l'occupation soviétique n'avaient plus la moindre valeur dans cette Allemagne unifiée, pas plus que leur monnaie maintenant désuète. On trouva à Jarek un emploi comme guide, alors que la ville, avec ses frontières nouvellement ouvertes sans les restrictions d'autrefois, vivait un nouvel essor touristique. Olga, elle, on la trouva tout juste assez bonne pour faire des sandwichs dans l'un de ces restaurants américains dont la spécialité résidait et résidera toujours dans la faculté à faire éclater les artères de ses consommateurs. Olga choisira donc, en toute justice, de se faire éclater le foie à coup de whiskey brut.
Et c'est ainsi que Jarek rentra chez lui, un matin de 1994, toutes ces images bien encrés dans sa mémoire. Il tourna la clef dans la serrure rouillée, fit un pas dans cet appartement miteux. Tout était à sa place habituelle, jusqu'à la bouteille de Jack Daniel's sur la table du salon. Sauf que, devant lui, elle était là, pendue au plafond, paisible, sans doute plus à sa place au bout d'une corde qu'elle ne le serait jamais dans un fast-food.
L'histoire d'un perdant oublié : c'est ce que l'on me raconta juste avant de m'introduire à Jarek.







*Je suis un Berlinois.
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

Nécropole
Les dalles de céramique étaient froides. La plante de ses pieds nus, toute racornie, arrivait encore à cheminer sans que le reste de son corps ne trouve à frissonner. Le carrelage englobait le couloir. Le sol, les murs et le plafond allaient tous vers un infini qui semblait très quelconque. Très quelconque…La fraîcheur des dalles est, à quelques reprises, interrompue par un liquide chaud. Et plus elle avance vers cet infini prosaïque, plus le fluide se répand sur le sol. Le liquide rampait sur la céramique comme un serpent, puis s’étendait comme si l’on avait piétiné celui-ci. Et c'était chaud. Et c’était brûlant. Et ça couvrait la blancheur du sol. Un simple regard à ses pieds permit à Divine de se rendre compte que ce liquide n’avait rien à voir avec l’urine qui coulait le long de sa cuisse. C’était du sang. Quoi de plus banale…La jeune fille, imperturbable, essuya la pisse qui déshonorait sa jambe nue de manière détachée et grotesque. Elle scruta, comme absente, ce décor lugubre, effleurant du bout des doigts le carrelage du mur. S’approchant toujours un peu plus de cette infinité médiocre (ou était-ce de cette médiocrité infinie?), la sève vermeille continua de s’accroître dans le corridor jusqu’à, non seulement humecter ses pieds, mais lui arriver jusqu’aux genoux. Puis, le fluide rouge devenait, peu à peu, violacé, sans que l’on puisse expliquer pourquoi. Divine réussit enfin, sans avoir vraiment cherché d’ailleurs, à trouver d’où venait tout ce sang. Sur les murs étaient accrochés fragilement, ici et là, des tuyaux de diamètres variés. Les boyaux métalliques étaient mal vissés, rouillés, et le sang coulait abondamment de ces imperfections. Puis, sans logique aucune, un des tuyaux n’était relié à aucun autre et laissait affluer un liquide bleu opaque…Violet. Le fluide violet atteignait maintenant son pubis. Ça lui emprisonnait les jambes. Elle avait mal. Elle ne pouvait plus avancer. Son utérus gonflait. Elle allait explosé, c'était certain. Elle allait mourir.

Mmh.

Divine se réveilla, sans sursaut, mais avec soudaineté. Elle s’était redressé sur le coup, mécaniquement.

Ses yeux s'agitaient entre ses longs cils. Ses pupilles, encerclés de ses iris jaunâtres, se posèrent sur les murs blancs et vides de sa chambre. Sans peinture. Sans papier peint. Sans poster. Sans fenêtre. Seulement un peu crasseux ici et là, et un ou deux gribouillis dessinés alors qu’elle n'avait que cinq ans. Une sorte de troue noire avec des jambes et un cerf avec des oreilles de lapin et un corps d’homme. La gamine, du haut de ses douze ans, écarta la couverture rêche et grise qui lui recouvrait encore les jambes. Une flaque sanguinolente souillait ses draps et ses cuisses.

«Félicitation ma chérie, tu es désormais une femme», souffla la tête de cerf, se figeant par la suite dans son drôle de rictus habituel, si inquiétant avec ses grands yeux noirs et globuleux. Des yeux de poisson.

Divine n’y répondit rien et, encore toute aveuglée par le sommeil, pleurant silencieusement de fatigue, elle sortit paresseusement ses jambes du lit, les laissant se balancer à leur gré. Sa tête, quant à elle, ballottait de gauche à droite. Ses longs cheveux noirs suivaient le mouvement. La petite étira la peau de son visage cireux avec ses doigts fragiles avant de s’étirer longuement, faisant craquer ses poignets délicats, sa colonne vertébrale et tout le reste de son corps chétif. Ses doigts vinrent aborder la peau fine de sa nuque. Bon matin. Puis, elle laissa retomber mollement ses bras. Elle passa sa langue sur ses lèvres fines et craquelées.

Ses orteils allèrent étudier la texture du parquet…Puis, elle se mit sur ses deux pieds. Elle semblait si minuscule dans ce T-Shirt déchiré. Trop grand.

On entendait deux voix distinctes s’engueuler dans la cuisine…

Bon matin…Bon matin.
Une femme, maintenant.

Le liquide chaud et vermeille coulait le long de sa cuisse.








L’enfant, qui s’était métamorphosée en femme au courant de la nuit, telle la larve qui serait devenue mouche, déambulait sur un sol mugissant de douleur due à son arthrite qui l’empêchait même de supporter le poids de cette petite «femme».

Si la frêle Divine avait dirigé ses pieds bleuis vers la salle de bain, elle aurait sans doute jeté un regard, sans violence, sans empressement, dans le miroir. Son reflet aurait pu attraper en plein vol, en étirant son bras maigrelet, ce regard lancé négligemment. Face à elle-même, elle constaterait alors qu’elle n’avait ni l’air plus femme, ni l’air plus mouche que le matin précédent. Elle ne verrait que son visage rond, ses iris jaunes, ses cernes violacées, sa peau malade, ses lèvres roses. Peut-être que, à force de dévisager et d’analyser son double, elle se rendrait compte que le bout de ses seins commençait à pointer de façon grossière et qu’une petite rougeur sous sa fine lèvre inférieure menaçait de bourgeonner avec le printemps. Par la suite, ses yeux auraient précautionneusement caressé la peau blanche et fraîche de sa jambe ensanglantée, la coulée du liquide vital ayant déjà atteint ses chevilles, jusqu’à se laisser tomber sur le carrelage blanc... Identique à celui de son rêve. Dans le miroir, un infini prosaïque au fond de sa pupille.

Mais, elle n’en fit rien. Elle avait laissé ses draps rougis de sang là où ils étaient. La petite ne prit pas non plus le temps de se changer. Inutile. Improductif. Le fluide vermeil allait continuer d’affluer de toute manière. Sa mère, ménopausée depuis déjà un an, n’achetait plus guère de tampons. Elle devrait aller à l’école ainsi.

«TU ES COMPLÈTEMENT MALADE!», hurlait une voix aiguë et manifestement féminine.
Divine s’était rendu à la cuisine. Là où les deux vibrations sonores ne cessaient d’aboyer entre eux. Contre eux. Derrière elle, un large sillon sanglant la suivait, aussi fidèle que son ombre. Ça ressemblait un peu à la traînée gluante qu’aurait pu laisser un escargot ou une quelconque autre limace. Elle resta aux abords de la pièce, épiant d’un œil épuisé les deux personnages qui y étaient à gesticuler abominablement. Il y avait de la porcelaine brisée sur le sol, signe que la vaisselle avait volé dans la pièce, encore une fois.

«Malade!? CE QUE JE FAIS, ÇA ME REGARDE!», rétorqua une voix visiblement plus virile.
L’homme abattit ses énormes poings contre la table luisante. Sur celle-ci, Divine pouvait y voir une femme, couchée sur le dos. Elle était grande et mince, même que sa tête se laissait tomber à l’extérieur de la table qui semblait pratiquement faire l’office d’un autel, sa nuque appuyée contre son rebord. Ses jambes, pendouillant de l’autre côté, étaient écartées de manière indécente. Son visage allant dans la direction de la porte, où la petite femme se tenait toujours, lui permettait de voir distinctement ses traits. Ses cheveux dorés étaient longs, ses pointes balayaient presque le parquet de bois. Ses yeux, encore ouverts, paraissaient aveugles. Et ceux-ci la fixaient, sans relâche, comme se questionnant sur quel genre de petite voyeuse pouvait-elle bien être. Mais, sa physionomie figée laissait clairement sous-entendre qu’elle ne se préoccupait aucunement de son impudeur, à elle et à celle de la petite. De la bouche entrouverte de cette inconnue s’écoulait un liquide noir qui tombait goutte à goutte sur le plancher. Sa chair était veineuse et tournait déjà vers le bleu. Elle était morte il y avait déjà quelques temps.

«Je refuse de me nourrir d’un corps souillé!», finit par articuler l'ogresse matriacale, avant de fondre en sanglots, s’éloignant de la morte offerte telle une succube, cachant son visage derrière ses doigts maigres. Puis, le monde cessa de tourner. Interpellé par le parfum caractéristique du fluide menstruel, le couple de monstrueux humanoïdes se tournèrent vers Divine. Macchabée, celle qui était à l’origine des hurlements féminins, alla prendre tendrement sa fille dans ses bras squelettiques, profitant de l'arrivée de son enfant pour prendre quelques secondes de répit. Elle ne remarqua pas le liquide qui tâchait sa cuisse. Elle ne savait pas que sa petite puce était devenue femme. Le visage fané de la génitrice offrit une poussière d’amour maternel.

«Divine, ma chérie!»

Sa voix, qui était vieillie et stridente jusqu’alors, s’adoucie.
Puis, brusquement, elle fit pivoter la gamine sur elle-même, se servant d’elle comme d’un mur impénétrable entre sa pitoyable personne et l’ogre ventru qui lui servait d’époux. Divine était passée de larve à mouche à bouclier humain. Elle ne chigna pas. Sans émotion. Sans apathie. Sans trouble.

«Regarde ce que ton père à encore ramener à la maison! Regarde! Il l’a déterré ce matin! Regarde! Ça va bientôt pourrir et il va y répandre sa semence! Regarde ce que fait ton père! JE NE VEUX PAS MANGER UN CORPS SOUILLÉ!»

Ce grand homme à la mâchoire carrée n’était pas son père mais Divine se refusa à la corriger, toujours impassible et sans sympathie pour sa pauvre daronne aux joues creuses. Balthazar répondit à Macchabée un copieux «tais-toi», suivit d’une série d’obscénité. La gamine, insensible à l’atmosphère macabre et à la vulgarité de la scène, laissa sa mère à son sort. La traînée sanguinolente la suivait toujours et celle-ci s’intensifia quand la petite marcha sur un morceau de porcelaine, mutilant généreusement son pied. Elle ouvrit le frigidaire et se servit un verre de jus de betterave. Elle alla s’asseoir sur une chaise, face à la table où la charogne présidait toujours. On aurait pu entendre le sang dégoutter sur le sol, s’échappant de ses deux jambes croisées, si son beau-père n’avait pas repris de plus belle.

«JE FAIS CE QUE JE VEUX, C’EST CHEZ MOI AUSSI!»

Il attrapa la quinquagénaire par sa tignasse brune et, après une violente gifle, écrasa le crâne de celle-ci contre la table. Puis encore, et encore. Elle hurlait, hystérique, furieuse, et ses bras volaient dans tous les sens, cherchant à griffer son mari.

«J’te…», commença la femme mûre.
Il cogna sa tête contre la table à nouveau. Celle-ci vibra de haine et Divine fit bien attention à ce que cela ne renversa pas son verre.
«…DÉTESTE!»
Il cogna encore. Encore. Puis une nouvelle fois, avec force et violence. Les yeux de Macchabée étaient rivés sur sa fille. Divine pouvait alors observer à son aise le rictus déformé de sa pauvre maman fluette. L'homme, les yeux noirs et veineux, arracha, sans difficulté, un lambeau de chair au cadavre qui n'avait rien demandé. Il enfonça littéralement le morceau de viande dans le fond de la gorge de cette femme qu'il continuait de brutaliser. Pour la faire taire, elle n'avait ce qu'elle méritait. Là où Balthazar avait retiré la chair, on pouvait apercevoir quelques larves creuser dans la peau et les muscles. De la sève couleur cerise coulait des naseaux de Macchabée et de la commissure de ses lèvres. Divine pensa que la chose paraissait sucrée. Elle essuya le menton ensanglanté de la génitrice, du bout de son doigt, et porta le fluide à ses lèvres. C’était ferreux.

Elle haussa des épaules, se leva. Balthazar recommença à heurter le crâne de son épouse contre la table. Divine quitta la pièce. Elle devait se rendre à l’école. Dans la cuisine, on pouvait entendre le verre se briser au sol et la tête de la pauvre femme résonner contre la table. Encore. Encore. Et encore.

On ne l’entendait plus crier.
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

Ninel

Une heure et cinq minutes. Le matin. La nuit, en réalité. West Side. Dans les ghettos. C’est une nuit comme les autres, aussi inintéressantes que les autres. Ninel est déjà éreintée de se tenir sur son petit bout de trottoir, sur ces talons hauts qu’on la force à porter. En plus, ça ne fait pas d’elle une zhenshchina tellement plus sexy. À vrai dire, on peut bien voir que les veines de ses pieds vont bientôt éclatées tant elles sont bleues et gonflées et ses orteils doivent être plus que rouges, peut-être violets. Mais, elle reste là, parce que la vie ne lui a pas donné le choix. Et parce que ça ne lui fout pas grand-chose que ses veines éclatent. Elles éclateront et puis amen.

Elle s’est assise sur son trottoir. Elle sait qu’elle n’a pas le droit mais elle est fatiguée. On viendra la relever plus tard. Elle a mal aux jambes. De toute façon, aucune voiture n’est passée depuis au moins 30 minutes. Elle n’aura qu’à se lever quand quelqu’un passera. Et puis pourquoi faire? Tendre le cul. Elle est assise et elle retire la seringue de son bras. Soudainement, ses jambes ne lui font plus mal. Mais, elle est si bien assise. Oui, mais elle ne souffre plus. Elle se relève et tient misérablement sur ses talons. Elle porte des bas de nylons, faible protection contre la fraîcheur de la nuit. Mais, elle n’a plus froid non plus. Puis, il y a cette jupe, semi-transparente, ce t-shirt moulant et cette petite veste de cuire. Pas de soutif. Pas de petite culotte non plus d’ailleurs. Pas de superflus. Elle frotte un des ses yeux et vient étalés quelque peu son maquillage. On s’en fiche.
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

L’Enfant-Monstre

Il s’était déshabillé devant le miroir de la salle de bain. Longuement, il avait regardé son reflet. Son attention s’était d’abord attardé sur cette bosse censée lui rappeler l’endroit où aurait du être son bras. Le moignon était recouvert d’une membrane translucide en guise de peau. On pouvait voir l’os bouger, à travers. Lui-même en était rebuté. Il glissa son regard sur la peau jaune et cireuse de son double, les cercles noirs sous ses globes oculaires, ses lèvres roses et sèches.

Puis, ses prunelles vinrent se poser sur la plaie pourpre qui ornait le flanc de son reflet. Il glissa le bout des doigts sur cette marque qu’il avait également, jumelles. La meurtrissure n’avait jamais complètement cicatrisé puisque, longtemps, il s’était amusé à la rouvrir en la forçant de ses ongles. Le jeune homme devant lui en faisait sans doute de même.

Il se détourna de ce qu’il voyait de l’autre côté du miroir et entra dans la baignoire qu’il avait préalablement remplie d’eau de javel. Un esprit malade dans un corps aseptisé, c’était là la clef de son existence. Il ramena ses genoux près de lui et ferma les yeux.

Derrière ses paupières défilaient des visions.

Il y avait deux corps scindés en deux dans une pouponnière, couchés l’un contre l’autre dans leur berceau. On y comptait deux têtes, aux crânes minuscules et velues. Il y avait quatre jambes, trois bras. Il y avait deux colonnes vertébrales, deux foies, trois reins, deux estomacs, trois poumons et demis et, finalement, deux cœurs qui battaient au même rythme.

Cette déformation congénitale, c’était lui et c’était ce qu’il aurait du voir se refléter sur le métal poli de la salle de bain. C’était ce qu’il avait été : une créature étrange, pourvue de deux têtes et d’un bon nombre de pattes. Une sorte de monstre sans coordination, avec une peau olivâtre et des veines saillantes.

Les parents de la créature étaient très pauvres et peu éduqués. Ce rejeton difforme était la plus infâme calamité que l’on pouvait leur infliger. Les deux cœurs étaient littéralement inséparables. En effet, à leurs jeunes âges, une telle opération aurait été meurtrière. De toute manière, la famille n’en aurait pas eu les moyens. Le couple fut alors à la merci de l’Enfant-Monstre et l’Enfant-Monstre fut à la merci du Monde. Bien qu’il ait eu deux systèmes nerveux, on ne lui donna qu’un nom : Salvatore.

L’Enfant-Monstre devint une curiosité et gagnait en renommé à mesure qu’il grandissait. Plus les années passaient, plus les gens étaient fascinés par son obstination à ne pas mourir bien qu’il fut une grossière erreur de la nature. Certaines personnes traversaient tout le pays ne serait-ce que pour apercevoir le miraculé. Même, parfois, des gens venaient le rendre visite depuis plus loin encore. Ces gens tantôt se disaient tératologues et mesuraient les deux crânes, vérifiaient les pouls, tantôt ils s’agissaient de pèlerins venant prier avec ou pour Salvatore. Les voyageurs laissaient habituellement un peu d’argent aux pauvres parents qui avaient enfanté l’Enfant-Monstre.

Un jour, un homme vêtu d’un complet gris, chose inconvenante pour la saison, leur offrit une bien coquette somme d’argent. Riche philanthrope, ex star du cinéma ou actuel politicien, il exigeait cependant à ce que la majeure partie de la somme serve à financer les soins de l’Enfant-Monstre, maintenant assez grand pour la grande Opération. Avec cet argent, on coupa Salvatore en deux. On nomma la partie coupée Luciano.

Luciano avait une tête, deux jambes, deux bras, une colonne vertébrale, un foie, deux reins, un estomac, deux poumons et un cœur.

Salvatore, lui, avait donc une tête, deux jambes, un bras, une colonne vertébrale, un foie, un rein, un estomac et un poumon et demie.

Luciano aimait Salvatore comme un frère. Il aimait aussi sa mère, son père, sa bicyclette et ses romans d’aventure.

Salvatore aimait Luciano comme lui-même. Il aimait aussi le silence de sa chambre et dessiner sur sa fenêtre embuée.

Luciano grandit et se fit beaucoup d’amis.

Salvator se recourba et se retrouva seul.

Luciano devint un être à part entière.

Salvatore n’était plus que la moitié de ce qu’il était.

Salvatore rouvrit les yeux. Il baignait toujours dans sa baignoire comblée à rebord de la substance aqueuse et rédemptrice. Il se leva quand il sentit enfin la morsure des produits chimiques, se sécha et quitta la salle de bain, sans un regard pour son double. Mais, il le recroisa tandis qu’il descendait l’escalier. Luciano se tenait au milieu du salon. Il cilla. C’était la première fois depuis un an maintenant que les deux entités se retrouvaient, en même temps, dans la maison familiale. La demeure avait été payée par les Siamois, avec ce qu’il restait de l’argent du Philanthrope. Ils étaient maintenant là, le ou les bras ballants, s’épiant tout d’abord comme deux étrangers. Puis, un sourire. «Va donc t’asseoir à la cuisine.», demanda Salvator. Luciano alla alors s’asseoir à la cuisine. Il vint le rejoindre au bout d’un moment, servant silencieusement le dîner. Ils étaient seuls dans la demeure. Leurs parents étaient morts depuis déjà quatre jours et leurs dépouilles reposaient dans la cours, selon leurs vœux. Ils adoraient cette maison.

Salvatore et Luciano les avait enterré, aujourd’hui. C’était là l’ultime raison de leur présence dans la vieille maison. C’était aussi, peut-être, la raison du silence du cadet. L’aîné aussi se taisait mais il avait toujours été taciturne.

Salvatore s’occupa de découper la viande de Luciano avec la tendresse que l’on porte à un petit frère. La chair était saignante. Ils souriaient et chuchotaient, sans trop savoir pourquoi. Parfois, Luciano riait. Salvatore lui souhaita bonne appétit. Ils buvaient du vin et discutaient, avec nostalgie, de certains évènements du passé, partagés, chéris.

Puis, brusquement, Luciano se leva. Pris d’une vive douleur, il se tordit. Il plissa ses doigts au dessus de son cœur et regarda son frère. Salvatore ne bougea pas. Moins d’une minute plus tard, Luciano s’écroulait ultimement.

Salvatore observa ce reflet, ce double, ce membre arraché à lui qui trônait comme une poupée de chiffon sur un sol voilé de poussières. Fort habile malgré un bras manquant, il arriva à traîner la guenille jusque sur la table. Tout allait selon ce que le Monstre avait prévu. Salvatore sorti du placard la trousse de premier soin. Il s’assit près de l’Enfant. En buvant, il avait porté un peu de cyanure à ses lèvres. Ce dernier, avec un dosage bien maîtrisé, plongeait l’empoisonné dans un sommeil profond mais temporaire. Un coma. Le Monstre trouva dans sa trousse du fil préalablement relié à une aiguille. Il trouva du désinfectant avec laquelle il nettoya la cicatrice au flanc de son frère, son reflet. Il utilisa ses ongles pour rouvrir la blessure, faisant de même avec la sienne. De sa seule main, il alla recoudre leurs plaies l’une à l’autre. Cette partie de lui que l’on avait baptisé Luciano était si cher à son cœur. Il la retrouvait, enfin, une couture à la fois. L’aiguille pénétrait la chair sans difficulté bien que leurs stigmates aient pu durcir un peu la peau par endroit. Un liquide presque noir s’échappait de leurs corps ouverts. C’était épais et tiède.

Une fois la chose accomplie, Salvatore s’allongea auprès de Luciano, ainsi, sur la table, dans leur sang, soudé l’un à l’autre comme autrefois. Pour toujours. Deux cœurs scindés. Il ferma les yeux.

Ses visions n’auraient plus une saveur si amère, désormais. Il en était tant convaincu qu’il ne ressentait plus la moindre culpabilité pour le meurtre odieux de leurs deux parents. Il avait réalisé ce tour d’une façon toute simple. Un soir, il avait glissé un scorpion dans leur lit et, au matin, ils étaient morts. Mais, Salvatore n’y penserait plus. Il se sentait si fatigué. Il pourrait dormir, à présent.

Il s’était réveillé au crépuscule. Luciano dormait toujours. Il dormit le jour suivant et ne se réveilla pas le jour d’après. Salvatore errait dans la demeure qui grinçait sous ses quatre pieds. À dire vrai, le sol ne geignait que sous deux d’entre eux car les pieds de Luciano, inertes, se contentaient de glisser sur le parquet.

Au bout de sept jours, une odeur rance imprégnait l’Enfant et aucun bain d’eau de javel n’en venait à bout. Les mouches tournaient autour, se posaient et s’envolaient. Elles avaient pondues des œufs dans la bouche entrouverte de Luciano, maintenant pleine de larves grouillantes. La couture avait noircie, comme rongée par la gangrène. Salvatore du se rendre à l’évidence : Luciano était mort.

Salvatore se regarda dans le miroir. Il y vit deux corps pourries.
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

Julien

Je me souviens de mon premier rôle. Je devais enfiler les chaussures de Gavrilo Princip. Je me souviens d’avoir assassiné l’Archiduc François Ferdinand avec un peu de farine pour poudre à canon. Je me souviens du bruit de la détonation qui jamais ne s’imprima sur la pellicule. Je me souviens de cette envolée blanche et poudreuse.

Je ne me souviens pas du nom du film.

Mais, je me souviens qu’à la première, après la projection, une marée de gens est venue me rouer de coups. Je portais les chaussures du meurtrier serbe et une redingote en location. On me l’avait mise en pièce, j’avais donc perdu les 80 francs de la caution.

Je me souviens du plancher de notre appartement parisien qui gémissait à chacun de nos pas. Je me souviens du rire de Mathilde.

Je me souviens que j’étais jeune, à cette époque là. Ce jeune homme de mes souvenirs, il ne me ressemble plus beaucoup. Certes, nous avons bien des traits communs. Toutefois, ma moustache n’est plus aussi noire et mes idées ne sont plus aussi claires. La vie n’est plus ce qu’elle était. Je ne suis pas si vieux, c’est vrai… Mais, l’arthrose a changé certaines perspectives : je vois désormais le monde avec des yeux plus fatigués. Alors je reste ainsi, assis dans mon lit, et je me souviens.

Je me souviens d’un temps où j’étais moins vieux et plus heureux. Je me souviens que l’on me surnommait Titi le Parisien…Ce n’est pas le nom que l’on donne à un vieil homme triste et seul. Mais, vous savez, les choses changent si vite.

Je me souviens de La Bête humaine, celle de Renoir et non pas de Zola. Je me souviens de la Seine et je me souviens du Corra, ce grand étang près duquel j’aimais me promener, fut un tant. Il y a longtemps, il me semble.

Je glisse une main dans la poche de ma chemise. J’en retire le paquet de cigarette que Claude a oublié ici la dernière fois qu’il m’a rendu visite. J’y sors ce qu’il faut pour m’encrasser les poumons.

Je ne sais plus très bien depuis quand je suis cloué ici, crucifié à mon lit. Je ne sais plus depuis combien de temps mes articulations me font souffrir. Je ne sais plus depuis combien de temps ma tendre Mathilde est partie. Je ne me souviens plus et j’oublie. J’oublie que l’on a déjà été heureux.

Et puis, j’allume cette fichue cigarette. Je la coince entre mes lèvres. J’essaie d’oublier. J’essaie d’oublier cet élancement douloureux aux genoux. Toutefois, je me souviens de la souffrance accrue qui lacère les articulations de mes jambes, au moindre mouvement. C’est une chose qu’il ne vaut mieux pas désapprendre. Je me suis habitué à l’immobilité et au silence.

Je tente donc d’effacer tous ces souvenirs de ma cervelle liquéfiée, de dissoudre ma mémoire dans la contemplation du poison qui se consume à mes lèvres. Je me concentre sur le silence mais entend les palpitations de mon mal résonné dans mes tempes. Je sens mon cœur battre. Le vent souffle et le plancher grince. Je pose mes yeux sur le magazine que j’ai posé sur le drap posé sur mes cuisses. C’est le 180ième numéro des Cahiers du cinéma. J’ai demandé à Claude de me l’acheter, car on m’avait dit qu’on y parlait de Jean Renoir. Je ne l’ai pas encore lu. Je me contente d’observer le nom de mon ami imprimé au côté de celui d’Howard Hawks et de François Truffaut. On m’avait déjà fait beaucoup d’éloge dans certains numéros des Cahiers. On m’avait aimé dans le film Je reviendrai à Kandara, en 1957, je me souviens. Je ferai mieux d’oublier.

J’ai les yeux rougis par ce voile de fumée qui m’assaille. L’air est sec. Je garde les paupières mi-closes un moment et ma vue se trouve embrouillée. J’entrevois cependant une petite chose longiligne, blanche et floue. J’ouvre les yeux et me surprend à contempler ma cigarette. Je constate bêtement que la cendre à fait son bout de chemin et qu’il serait temps de m’armer d’un cendrier. C’est naturellement que je me tourne vers celui de ma table de nuit. Je geins, instantanément tourmenté par une vive douleur. J’interromps alors mon mouvement et me remet droit sur mon lit, le cendrier dans les mains. Je regarde la cigarette, je regarde son bout qui tantôt rougeoie, tantôt grisonne, selon si j’en tire une bouffée ou non. Je contemple le magazine juste en dessous. Je me surprends à penser. Je me dis que, heureusement, je ne me suis pas endormi une cigarette en bouche. Quelle drôle de tragédie se serait de mettre feu à mon lit. Quelle drôle de tragédie, je songe longuement.

Puis, au bout du compte, je me rends compte que je n’ai toujours pas fait un mouvement vers ma cigarette. Elle continue de se consumer. Je me surprends (je suis plein de surprise pour moi-même) à m’imaginer ce qu’il arriverait si jamais je laissais la cendre rougeoyante s’approcher un peu plus de mes lèvres jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus supporter son poids. S’éteindrait-elle au vol ? S’envolerait-elle dans un coup de vent, jusqu’à disparaître ? Me brûlerait-elle les lèvres ? Mettrait-elle feu aux rideaux ? À la corbeille ?

Mais au fond, je sais qu’elle tomberait sur le cahier, simplement. Peut-être que les pages s’enflammeraient ou peut-être que non. Mais, si elle s’enflammerait, je suppose que je serais pris immédiatement de panique et que je tenterai d’éteindre le feu avec mes mains ou un oreiller. Mais, peu importe la méthode que je choisirai d’utiliser dans cette subite catastrophe, il serait sans doute inévitable que la manche de ma chemise de nylon touche aux flammes et s’embrasent. Mon corps tout entier alors s’embraserait aussi, embraserait les draps et embraserait le lit. Une fumée vaporeuse s’échapperait de la fenêtre et, avec elle, une odeur de chair calcinée. L’instinct de survie en marche, je chercherai sans doute à sauter hors du lit. J’hurlerai pour toutes mes souffrances. Je tenterai de ramper, mes jambes paralysées par l’arthrose qui fissure mes cartilages. J’échouerai, bien évidemment, complètement impotent et pétrifié par mon calvaire. Je serai dégoûté par l’odeur de ma peau que je verrai noircir ainsi que par l’odeur des cheveux que je n’aurais plus. Je tenterai peut-être de me rouler sur le sol mais je ne ferai que mettre le feu au reste de l’appartement. J’abandonnerai quand je sentirai mes organes bouillir et se cuisiner à l’intérieur de l’écorce noir que deviendrait mon corps. Mon logis serait dévoré par les flammes et ma carcasse incinérée trônerait en leur centre.

J’observe la cendre progressée.

Je me souviens de tous ces souvenirs qui sont derrières moi. Je me souviens de cette carrière, belle et bien terminée. Je me souviens de mon mariage. Ça remonte à loin. Je me souviens de toutes ces nuits où cette douleur me réveillait pour me garder éveillé. Je me souviens du jour où mes genoux se sont mis à enfler et le jour où j’ai remarqué ces excroissances osseuses…

La cendre allait tomber.

J’ai fermé les yeux. J’ai compté jusqu’à trois. Un. Deux. Trois. Je les ai ouverts. Rien n’avait changé. Je les ai fermés à nouveau et j’ai pris une grande bouffée. Un. Deux. Trois.

Elle tomba.




''Je me souviens que Carette est mort parce qu’il portait une chemise en nylon et qu’il s’était endormi avec une cigarette''

George Perec
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

La Faim


Des hurlements avaient déchiré la nuit.

Une femme, convulsive et tordue, s’égosillait en gesticulant, s’entremêlant dans les draps rêches et odorants de son lit d’hôpital. Elle devait mettre au monde un bébé, un être vivant, fidèle à sa génitrice et amoureux, comme seul un nourrisson peut l’être. Toutefois, rien n’était moins sûr… On se disait dans la pièce, à voix basse, qu’elle évacuerait vraisemblablement de sa matrice un mort-né. L’enfant arrivait trois mois trop tôt et la femme s’étiolait de jours en jours. Sa peau pâlissait, devenait plus translucide : la pauvre semblait condamnée à disparaître. La grossesse aurait pu lui être funeste et un enfantement par voie naturel l’aurait certainement été. C’est pourquoi ils avaient transpercé l’épiderme suintant de la mère avec une aiguille, fine, qui injecta en elle une douce inconscience.

On s’afférait maintenant autour d’elle. Dehors il pleuvait à torrent et, pourtant, on n’entendait rien de l’orage… La chambre était hermétique au monde. Il n’y avait que cette femme étendue, immobile, disséquée comme une grenouille par l’homme blanc et son scalpel. Il y avait les infirmières, le docteur, le mari. Il y avait la progéniture, à venir. Tout le reste disparaissait dans le néant du silence, dans la plaie béante de la mère. Le sang coulait.

Cette nuit-là, vous êtes né.

Vous avez regardé pour la première fois la lumière avec un voile d’hémoglobine déposé sur vos yeux.

Telle votre mère auparavant, quelque chose grandissait en vous. Le médecin qui vous tenait dans ses bras n’avait rien décelé de tout cela. Cependant, une chose curieuse dans votre regard aurait dû trahir votre état. Vos yeux étaient noirs, noirs comme les profondeurs de la mer. Et la mer ne cessait de croître et de croître, s’engouffrant par vague dans un vide absolu, celui de vos pupilles. Le fantôme blanc, qui vous avait arraché des entrailles ouvertes de votre génitrice, vous avait cru mort. Vos prunelles inexpressives, la fraîcheur de votre pâle et tendre chair de poupon ainsi que votre silence faussait le diagnostique. Vous n’aviez pas pleuré et votre mère non plus. Votre père, lui, n’osait pas même poser le regard sur vous. Vous étiez tout à fait inerte et si frêle que le pauvre homme avait la certitude de votre décès prématuré. On craignait aussi pour la vie de l’épouse. Elle n’était toujours pas réveillée quand une infirmière est finalement venue raccommoder le ventre que le médecin avait charcuté sans grand soin.

Au même moment, alors que l’on du bien constater le battement de votre organe palpitant et ce souffle imperceptible qu’était le vôtre, la chose s’étendait en vous, toujours à s’accroître. Elle grandirait jusqu’à se coller à toutes les parois de votre corps. Cette chose, inaltérable, portait un nom : on l’appelait la Faim.

Votre mère était en vie, votre père se risquait finalement à vous regarder et, vous, vous aviez survécu à votre naissance. Mais, l’ère du silence prit fin dès votre retour de l’hôpital. Dès lors, vous ne cessiez de sangloter. Vous pleuriez un torrent de cris, de larmes, de souffrance. Vos deux parents se retrouvaient rongés par l’inquiétude mais aussi par un épuisement lancinant. Vous n’aviez pas deux jours que vous régniez déjà en maître dans votre nouvelle demeure : vous aviez notamment décrété que plus personne ne pourrait dormir désormais. Votre père vous ramena sans attendre dans cet édifice imperméable qui vous avait vu naître et l’on vous fit passer des examens. Votre mère, qui n’adressait plus un mot à qui que ce soit depuis votre arrivée dans le foyer maternelle, jouissait de cette accalmie. On ne trouva aucune explication à vos pleurs. Cela arrivait, tout simplement. Certains nourrissons pleuraient plus que d’autres, vous vous apaiseriez de vous-même avec le temps. C’est ce que l’on disait…

Vous ne vous êtes pas apaisé. Vous aviez mal, dedans, car la Faim continuait de forcer votre cloison. Votre génitrice se refusait dorénavant à vous offrir ses mamelles, quelque peu effrayée par cette étrange maladie qui vous accablait et qu’aucun pédiatre n’arrivait à détecter. Vous mordiez si fort à ses mamelons que du sang venait à en jaillir. Vous deviez à présent vous contenter d’un biberon de lait que vous dédaigniez la plus part du temps. Les spécialistes s’obstinaient à dire que cela arrivait.

Néanmoins, votre état s’aggravait. La mer noire de vos pupilles prenait un aspect blanchâtre, s’asséchant dans le lit de votre regard. Pourtant, vos yeux allaient biens, vous n’étiez certes pas aveugle et aucune sorte de tumeur ne s’était logée dans vos orbites. Les cheveux de votre mère blanchissaient au même rythme. La maternité avait fait d’elle une femme âgée, fatiguée, aigrie. Votre père, quant à lui, n’était désormais présent que lors d’un de vos rendez-vous périodiques à l’hôpital. Plus personne n’osait vous prendre, pas même vous effleurer, car vous aviez cette fâcheuse inclinaison à mordre. De plus, plus vous vieillissiez, plus vous adoptiez un aspect déplaisant. Vous restiez chétif, blême et vos os paraissaient vouloir percer votre épiderme. Vos cheveux poussaient avec une grande irrégularité et il vous arrivait de vous les arracher dans vos jours les plus sombres. Vos dents ne trouvèrent jamais le temps de pousser. Vous aviez cassé chacune d’entre elles, au fur et à mesure, vous en servant pour gruger les barreaux de votre lit et le bois laqué des meubles…Jamais vos parents ne vous envoyèrent à l’école tant personne ne pouvait s’accommoder de votre nature curieuse et animale.

Un jour, votre famille avait tenté avec quelques vains espoirs de vous inscrire dans l’une de ces garderies où séjourne ce qui aurait dû être, normalement, vos semblables. Votre mère vous avait quitté des yeux, quelques secondes, le temps de signer un papier peut-être. Il n’en fallut pas plus avant que le cri strident d’une petite fille retentisse dans les bacs à sable. Vous l’aviez mordu au visage avec votre terrifiante bouche édentée. Vous l’aviez mordu si fort que, même sans l’assistance de vos canines manquantes, vous aviez réussi à écorcher profondément sa joue.

Vos parents n’eurent d’autre choix que de vous garder près d’eux.

Vous grandissiez. Et la Faim, en vous, grandissait. Au début, votre mère s’occupait elle-même de vous donner vos leçons. Une fois par semaine, un tuteur venait voir vos avancements. Toutefois, vous n’avanciez pas et votre professeur cessa un jour de venir, comme ça. Vos parents ne signalèrent pas cette absence. Ils constataient avec abattement l’inutilité d’une telle initiative. Vous n’étiez plus qu’un fantôme qui hantait la maison. Vos géniteurs avaient plus tard décidé de s’exiler à la campagne, d’expulser l’infâme créature que vous étiez des veines d’une société beaucoup trop grouillante, pensant que cela vous ferait du bien. Près de votre nouveau logis, vous chassiez des mulots que vous engloutissiez, souvent sans vous gêner de leur pelage, parfois même sans prendre la peine de les mastiquer. Un soir, lorsque votre tendre maman cherchait à extirper de votre bouche l’un de ces rongeurs, vous avez refermé votre mâchoire sur son petit doigt. Votre mère beuglait et tentait de se défaire à vous avec la force d’une damnée. Elle avait fini par choir, dos au sol, à quelques mètres de votre personne. En se redressant, elle vit vos lèvres, rougis par un liquide vermeil et sirupeux. Et elle vous vit, avec effroi, avaler quelque chose, tout rond : son doigt. Vous aviez souri.

Les rendez-vous chez le pédopsychiatre, déjà fréquents depuis plusieurs années, se multiplièrent à ce moment. Puis, comme il fut le cas pour les classes, ils cessèrent naturellement d’avoir lieu. Votre père, ingénieux, trouva une solution adéquate à votre mal : vous porteriez désormais une muselière que l’on ne vous retirait jamais, pas même pour vous nourrir.

Votre mère, elle, songeait très souvent à mettre fin à vos jours et elle songeait tout aussi souvent à en finir avec sa propre vie. Néanmoins, elle n’en faisait rien, vous continuiez à grandir avec votre maladie et elle vieillissait avec le fardeau de vous avoir pour progéniture.

Elle pourrait vous noyer.

C’est à cela qu’elle songeait le plus souvent. Elle réfléchissait longuement à la question, des heures durant, se disant que plus les années s’écoulaient, moins il serait aisé de passer à l’acte. Vous n’étiez plus un bébé maintenant que la puberté faisait son chemin. La Faim vous dévorait un peu plus chaque nuit. Votre langue avait été titillée par le goût familier de votre mère. Cela vous rappelait peut-être cette vie chaude et douillette où votre corps ne s’était pas encore desséché et où la souffrance vous était encore étrangère. Parfois, au milieu de la nuit, votre mère venait vérifier si vous dormiez et, dans ces moments là, vous respiriez les effluves distincts de son parfum.

Cela vous tourmentait.

Un soir, vous vous êtes faufilé dans la chambre de vos parents. Votre géniteur avait le sommeil lourd et votre génitrice, plus nerveuse, avait avalé quelques somnifères. Elle n’aurait pu trouver le sommeil sans ses précieux comprimés, la pluie l’empêchait habituellement de dormir.

Cette nuit-là, il pleuvait comme au premier jour.

Vous avez commencé par enfoncer votre couteau dans le ventre de votre père. Une sorte de clameur s’échappa de ses lèvres mais rien ne pouvait réveiller la femme allongée près de lui. Toutefois, comme il s’agitait, cherchant à se défendre de vos intentions sordides, vous avez été obligé de glisser votre lame le long de sa gorge. Ce fut un travail salissant quoi que rapide et il mourut avant même que vous ayez rejoins votre mère, de l’autre côté du lit. Vous l’avez dévisagée, longuement.

Le tonnerre.

Votre mère vous dévisageait, elle aussi. Puis, elle ferma les yeux. Alors vous avez levé le couteau, lentement, et vous êtes resté immobile quelques instants. Vous avez attendu que la culpabilité ou le dégoût s’empare de vous. Vous avez attendu l’étincelle de vie, une tendresse jusque là inconnue. Vous avez attendu la peur. Mais ils ne vinrent jamais. Vous avez donc frappé son utérus. Son ventre. Son cœur. Le sang que vous aviez goûté quelques mois auparavant venait enfin souiller vos mains. Votre visage. Votre cou.

Vous avez alors trainé les corps jusqu’à la salle de bain. Le carrelage blanc se teintait du liquide écarlate qui faisait comme le tracé d’une limace derrière vous. Vous les avez déshabillés et jetés à la baignoire, espérant pouvoir y recueillir un peu de sang. Mais, il semblait que le précieux fluide était sur le point de sécher sur les draps de la chambre. Vous êtes allé chercher un second couteau ainsi qu’une scie. Vous vous êtes enfermé là, avec eux, toute une nuit. Vous avez tranché, découpé, déchiré, arraché. Vous étiez pourvu d’une grande patience, il fallait vous le concéder. Au matin, il était impossible de reconnaître ce que l’amas de chair qui trônait dans le bain avait pu être. Vous aviez séparé les os de la chair. Ensuite, vous vous êtes levé, vous avez essuyé votre front du revers de votre main et vous avez trainé vos pieds jusqu’à la cuisine. Vous avez mis un peu d’eau et un peu de sang à bouillir. Armé du couteau avec lequel vous aviez assassiné votre père, vous êtes allé découper quelques légumes. Vous pensiez à l’os qu’il faudrait bien choisir pour en dérober la moelle. Vous pensiez à la carcasse du père qui se mélangeait à celle de la mère, à la chair odorante et froide et à une mer de sang vermillon. Il ne pleuvait plus.

Et, bientôt, vous n’auriez plus faim.
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Re: La petite sirene

Message par Leonie »

Je viens de lire toutes tes histoires d'une traite, et il n'y a pas à dire, elles sont formidablement bien écrites. Sombres, envoûtantes, même en quelques lignes, j'en suis toute émue! :lol:

Du coup, merci, j'avais laissé tomber l'écriture (autre que les poèmes), maintenant j'ai envie de m'y remettre! :bise:
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

Et bien j'irais te lire dès que tu nous auras concocté quelque chose, en tout cas merci =) je n'ai pas écris depuis un moment et j'ai bien envie de m'y remettre aussi..Au prochaine vacances scolaire en tout cas.
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Re: La petite sirene

Message par Divine »

Oui je comprends que c'est pas simple de lire tout ça d'un trait mais je tiens à te remercier toi et tout ceux qui se donnent la peine de le faire, ça me touche beaucoup. Et merci de vos commentaires. Je risque d'être méga prise par les cours jusqu'en avril mais j'espère me remettre à l'écriture éventuellement.
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Re: Nécroses

Message par Divine »

Poète du mardi

Un cœur qui crépite
La nuit longue
Je sens son feu qui palpite
La chaleur de l’été
Volupté inodore
Sans saveur ni pluie
Une immensité aride
Qui à jamais me comble
Réveil brutale
Solitude lancinante
Qui à jamais me prend
Quand je quitte ses draps
Ça m'est égal d'être laide ou belle. Il faut seulement que je plaise aux gens qui m'intéressent.
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